Le Grand Site de France

La valeur patrimoniale du Grand Site Canigó

D‘un relief spectaculaire, le Canigó donne l’impression d’être détaché du reste de la chaîne des Pyrénées. Sa situation singulière, dans une position « insulaire », au contact direct du littoral méditerranéen qui s’élève avec vigueur de la plaine du Roussillon, rappelle d’autres montagnes emblématiques telles que le Mont Olympe en Grèce, l’Etna en Italie ou encore la Sierra Nevada en Espagne. Par ce contraste marqué entre plaine et montagne, le relief devient un facteur majeur de différenciation des paysages.

De ce fait, le Canigó impose naturellement sa silhouette, convoquant les regards et les imaginations des hommes au cours des siècles et depuis des points très éloignés : des confins de Barcelone jusqu’à Marseille. Il s’est imposé si profondément dans l’imaginaire des peuples qu’on l’a longtemps considéré comme la plus haute montagne des Pyrénées. Cette implantation géographique particulière explique le pouvoir symbolique et la fascination qu’il exerce encore aujourd’hui. Ainsi, le massif se découvre tout d’abord dans la distance.

Le Canigó est aussi une référence en matière de recherche scientifique. Fréquenté depuis le XVIIIe siècle par des savants géographes, géologues ou botanistes, il est en effet un emblème de la chaîne Pyrénéenne Orientale dont il offre une synthèse tant géomorphologique que géologique ou bio-climatique. Le massif présente une variété exceptionnelle d’unités paysagères faites d’unités géologiques contrastées (reliefs très découpés, doux ou abrupts), façonnées par le travail inlassable de l’érosion et des hommes et par un climat particulier, marquant la limite entre les influences océaniques et méditerranéennes. Ces conditions climatiques ont fait du Canigó une référence mondiale portée par les botanistes Charles Flahault et Henri Gaussen notamment pour la répartition altitudinale des espèces végétales au sein d’une montagne méditerranéenne 14. Tous les étages de végétation s’y succèdent et son positionnement à la frontière entre l’alpin et le méditerranéen souligne la diversité d’éléments naturels qui le compose et enrichit sa valeur patrimoniale et paysagère. Il offre ainsi un intérêt incontestable sur le plan floristique, dont on compte 11 espèces protégées, de nombreuses espèces rares et 30 espèces endémiques, ainsi qu’une grande richesse faunistique avec 125 espèces d’avifaune et 17 espèces de mammifères protégées.

Trois fois plus arrosé que la plaine avoisinante, le massif du Canigó ne constitue pas une frontière climatique mais il est responsable de l’opposition frappante entre le versant nord et le versant sud, entre le Conflent aux influences méditerranéennes et le Vallespir plus humide et frais. Il s’agit d’un véritable « château d’eau », d’où dévalent d’innombrables torrents et rivières alimentant les bassins versants de la Tet et du Tech, les deux principaux fleuves du département. Mise à profit de manière admirable par le biais d’un ingénieux système de canaux, toute cette eau permet de construire les paysages irrigués du piémont et de la plaine du Rosselló, dont les vergers soigneusement cultivés offrent un contraste pittoresque avec les pentes boisées et le sommet rocheux du Canigó. Ainsi, les paysages montagnards du massif du Canigó assurent une continuité patrimoniale entre le cœur classé et ses zones périphériques.

Le massif est également un espace de vie. Il est empreint des traces laissées par les activités des hommes et par ses croyances, dont les plus prestigieuses sont sans doute les grandes abbayes et prieurés romans de Saint-Michel de Cuxa, Saint-Martin du Canigó, Sainte-Marie d’Arles, Serrabona ou Marcevol qui ont fortement influencé les autres constructions religieuses du massif. Les rapports entre l’homme et la montagne remontent néanmoins aux temps préhistoriques. Les matériaux découverts dans la grotte d’En Bullà (Corneilla-de-Conflent) où dans celle du Trou Souffleur (Fuilla), couplés aux dolmens et pierres gravées témoignent d’une occupation humaine depuis le Paléolithique supérieur (45000 – 10000 av.J.C). L’on trouve également un patrimoine militaire abondant, témoin des tracés successifs des frontières (bornes frontières, Fort Lagarde,…), en particulier la cité fortifiée et le Fort Libéria de Villefranche-de-Conflent inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO au titre de l’oeuvre en réseau de Vauban. Les richesses naturelles du massif ont permis à ses habitants de développer progressivement une économie montagnarde diversifiée, dont la complémentarité des activités exprime son originalité.

Canaux d’arrosages, zones de pacage, cabanes en pierre sèche, chemins pavés ou murettes, éparpillés ici et là, constituent les empreintes visibles de la vie agricole et pastorale traditionnelle sur le paysage du Canigó. Trous de mines, forges à la catalane, colonies industrielles, fours à griller, déblais de scories ou places charbonnières constituent autant d’indices pour comprendre l’importance que l’industrie métallurgique a eu sur le massif. C’est à travers ce patrimoine vernaculaire que s’incarne et se perpétue l’identité propre de cet espace montagnard homogène, sa culture populaire spécifique, ainsi que les éléments caractéristiques de son paysage.

Montagne enchanteresse, montagne mythique, montagne diamantine…, le Canigó est devenu un emblème rayonnant sous la plume de nombreux auteurs, dont Rudyard Kipling (1865-1936), Roger Frison-Roche (1906-1999), Josep Pla (1897-1981), Thomas Mann (1875 – 1955) ou Joseph-Sebastian Pons (1886-1962), entre autres. C’est le célèbre poème Canigó de Jacint Verdaguer (1845-1902), publié en 1886 durant la Renaixença, qui a placé cette montagne comme un lieu privilégié incarnant l’identité de tout un peuple.

Monument naturel, culturel et paysager, le massif du Canigó est ainsi un espace patrimonial incontournable dont l’État a reconnu à plusieurs reprises le caractère pittoresque. Cependant, réduire la valeur patrimoniale du massif du Canigó aux seules statistiques (99 monuments historiques inscrits ou classés, 4 réserves naturelles régionales ou nationales, 9 sites Natura 2000, …) est réducteur et n’explique pas sa force d’attraction et sa place si particulière dans le cœur et l’esprit des catalans. N’y-at- il pas, dans les Festes de l’Os (fêtes de l’Ours) ou la Trobada del Canigó (le rassemblement du Canigó), une dimension plus subjective qui complète la valeur patrimoniale d’un esprit des lieux encore plus puissant ?

Évocation de l’esprit des lieux du massif du Canigó

« Seul, à l’extrémité orientale de la chaîne, le Canigó remonte de l’âge obscur des montagnes mythiques. Sa situation face à la Méditerranée, dans l’espace culturel des vieilles civilisations, lui donne un prestige particulier, grandi dans ce berceau du monde où tant de cimes patriarcales, du Sinaï au mont Ararat, de l’Olympe au Parnasse, ont illustré l’histoire de l’humanité ». Si sa situation de montagne littorale en fait la boussole des catalans où l’amer des marins, le Canigó fédère, par-delà les frontières, les habitants de tout un peuple, le peuple catalan, qui le considère comme sa montagne sacrée. Le Canigó n’est pas qu’un pic et un colosse de pierre. C’est en effet tout à la fois, une âme, un peuple, une identité, une mémoire, un massif que les catalans n’hésitent pas à personnaliser, tel un être unique et universel qui agit, rassemble, protège, inspire, enseigne.

Le Canigó, terre identitaire

« Le Canigó habite un peuple » aux dires de Joseph Ribas. Les Catalans le vénèrent comme un lieu privilégié de leur identité. La chanson traditionnelle Muntanyes regalades, hymne en hommage à ce sommet emblématique, est devenue populaire jusqu’aux contrées les plus reculées de la Catalogne. Elle traduit ainsi le rayonnement de l’esprit de ce lieu dans le tempérament singulier d’un peuple dont la culture remonte à des sources très lointaines. Sur les fondements de la Catalogne, le Canigó est encore l’un des pôles de la catalanité. Moments de communion et de fraternité, la Trobada et la Régénération de la flamme du Canigó, qui illumine les feux de nombreux villages des Pays Catalans la nuit de la Sant Joan, sont des exemples très précis de la dévotion qui entoure encore aujourd’hui cette montagne symbolique.

Le Canigó, terre de spiritualité

Du fait de sa position géographique, le Canigó a de tous temps imposé sa présence gigantesque, plus haute que nature. Il a ainsi convoqué autour de lui les regards et les imaginations les plus audacieux. Savants, chercheurs et poètes ont en effet dressé une « muraille de légendes » populaires, inspirant chez les peuples qui l’environnaient le sentiment du « sacré ». Cela explique le pouvoir symbolique et la fascination que le Canigó exerce encore aujourd’hui. Chaque élément paysager renvoie à une mémoire orale très riche, transmise et réinterprétée de génération en génération. Ainsi, le Puig Barbet serait le lieu où Noé attacha son arche attendant la fin du déluge universel ; le Pic des Set Homes représenterait sept géants changés en rochers pour avoir défié les dieux ; Pierre le Grand aurait trouvé un dragon sortant des eaux de l’Estanyol lors de la première ascension connue du Canigó au XIVe siècle ; la sépulture de Roland se trouverait dans le dolmen de la Caixa de Roland, aux limite d’Arles-sur-Tech et de Montbolo ; les Esquerdes de la Rotjà auraient été formées par les cris de Pyr, prêtresse du feu, lorsque son père la frappait violemment à coups d’épée ; etc. Terre mystique et sacrée, le Canigó est devenu depuis l’époque médiévale un havre de foi. L’importance des abbayes et prieurés qui sillonnent le massif, œuvres majeures de l’art roman catalan, exprime plus particulièrement la puissance spirituelle des lieux.

Le Canigó, terre de liberté

Espace sauvage, difficilement accessible, le massif du Canigó a offert à plusieurs reprises le long de l’Histoire, ses pentes et vallons comme un refuge naturel face à la folie déchaînée des absolutismes et des totalitarismes. La liberté a inspiré les populations du massif, lestes au combat face à la résignation. Ainsi la mémoire est vive des combats des « Angelets de la terra » (Angelots de la terre) contre le despotisme de la monarchie française au XVIIe siècle ; des malheurs des Républicains espagnols fuyant les troupes fascistes du général Franco lors de la Retirada ; ou encore des combats de la Résistance contre l’Allemagne nazie, dont le village martyr de Valmanya et le hameau de la Pinosa en sont les symboles majeurs. Plus récemment, dans le sillage de mai 1968, plusieurs villages du massif en voie de désertification se repeuplent de collectifs libertaires. Réagissant contre la société de consommation et vivant des expériences communautaires, ces villages ont participé à l’évolution des mentalités et constituent à ce jour des lieux symboles de liberté, de sens et d’humanité.

Le Canigó, terre de mémoire

Le Canigó conserve dans ses flancs les joies et les peines des femmes et des hommes qui y vivent depuis des siècles. Mémoire de la terre tel un livre ouvert sur l’histoire géologique du massif. Mémoire des mineurs, exploitant depuis l’Antiquité le minerai de fer et dont les vestiges sont encore innombrables. Mémoire de bergers, qui de leurs mains ont façonné les feixes, construit orris et cortals et gravé des messages sur les pierres. Mémoire des phénomènes climatiques subissant les foudres du climat (aiguat, avalanche, glissement de terrain,…) pour rappeler à l’ordre les excès des hommes (déforestation, pression pastorale,…). Ainsi, parcourir le Canigó, c’est être immergé dans toute cette histoire sous ses différentes facettes.

Pour toutes ces raisons, « le Canigó se respecte. On ne fait pas qu’y passer. On y vient, on y reste, on y revient. Un temps pour certains, une vie pour d’autres, pour ceux qui ne sont pas nés là, mais qui avec le temps, sont devenus « ceux d’ici ». Le massif est une montagne ouverte qui, emprunte des valeurs de respect et de solidarité, a une âme et distille une force inspiratrice hors du commun. Tous les sens sont en éveil sur le Canigó : l’on voit, entend, ressent la montagne, son immensité, ses horizons, le silence, le souffle du vent, le chant des trobadistes, les sonnailles des troupeaux, le braiment des burros (ânes catalans), l’odeur des genêts en fleur… Car le Canigó est sensible, fragile, vulnérable à l’appétit de certains, qui voudraient en pervertir l’âme sur l’hôtel du profit à court terme. Mais le dragon du lac des Estanyols veille, comme veillèrent les maquisards en 1944 devant l’avancée des forces allemandes, les amoureux du massif au lendemain de l’affaire du Pla Guillem (1994) ou encore les élus du Haut Vallespir signataires du Serment de Montferrer (2004) pour s’opposer à la ligne Très Haute Tension.

1951-1999 Le site classé

Depuis 1951, date de son 1er classement en site classé, et plus largement de son 1er mode de protection faisant prendre conscience de sa valeur, le Canigó a connu bien des aventures qui expliquent aujourd’hui la labellisation Grand Site de France. Retour sur la période 1951-1999, durant laquelle les acteurs locaux ont pris conscience d’une part, de sa valeur écologique, paysagère… et, d’autre part, des dégradations en cours. Ils ont alors usé des dispositifs en vigueur pour tenter de le protéger…

Pour son caractère pittoresque, le sommet du Canigó est classé en 1951 au titre de la loi du 2 mai 1930. C’est le pic, sur 443 ha, qui est alors protégé.  Néanmoins, le développement touristique s’est amorcé rapidement, notamment sous la houlette du Syndicat touristique du Canigou (STC), première structure de coopération intercommunale à l’échelle des deux versants du massif, créée en 1966. L’accroissement exponentiel de la fréquentation touristique et de la pénétration automobile incontrôlée, favorisée par la création dans les années 1970 des pistes carrossables du Llec et du Pla Guillem, conduit à l’élargissement considérable du périmètre du site classé à 7789 ha, en 1983.

Devant l’émergence d’un projet de station de ski intégrée sur le Pla Segala, les Réserves naturelles nationales de Py et de Mantet sont créées en 1984, peu avant celle de Prats-de-Mollo-La-Preste en 1986 et la Réserve Naturelle Régionale de Nyer en 1988. Elles permettent de protéger une superficie totale de 11 544 ha située de part et d’autre du Pla Guillem. Dans ce contexte d’émergence d’une conscience environnementale, le STC estime qu’il est nécessaire de définir un nouveau type de développement du massif, harmonisé avec les réglementations des différents modes de protection en place. C’est ainsi qu’il devient, en 1984, le Syndicat intercommunal pour l’aménagement rationnel du Canigou (SIPARC) dont les nouvelles orientations permettent une adhésion communale plus large.

Article de presse évoquant le projet de station de ski à Mantet / Midi Libre, 11/01/1970. / ADPO

Néanmoins, cette politique « défensive » ne parvient pas à endiguer la dégradation persistante du massif : les stationnements abusifs des véhicules sur les talus et les pelouses d’altitude, l’accumulation des déchets sur les principaux lieux de concentration, la dégradation de l’équilibre écologique et paysager du site persistent. Dans ce contexte, l’État est sollicité par les élus locaux et les associations environnementales pour réagir : le massif du Canigó est alors inscrit sur la liste ministérielle des Grands Sites, publiée en 1989.

Suite à des travaux catastrophiques pour l’environnement, réalisés sur la piste inter-vallées du Pla Guillem en 1994, l’État prend en main la situation et lance activement la démarche globale d’Opération Grand Site. Abordant les problématiques de la fréquentation et de la gestion environnementale du site, plusieurs rapports et diagnostics complémentaires, réalisés entre 1996 et 2000, servent de base pour définir les axes de la politique à mener sur l’ensemble du massif. Outre des actions de préfiguration engagées dès 1998 sur des zones emblématiques du massif (sur les secteurs des Cortalets, de Marialles et du Pla Guillem), un projet global est défini puis validé par la Commission Supérieure des Sites, Perspectives et Paysages en 1999.

Un véhicule sur l’ancienne piste du pla Guillem / Gérard SOUTADÉ

Travaux de revégétalisation sur le pla Guillem / SMCGS

Le pla Guillem en 2011 / SMCGS

ZOOM : « l’affaire du Pla Guillem »

Face à la problématique de divagation des véhicules constatée autour de l’emprise de la piste intervallée reliant Vernet-les-Bains à Prats-de-Molló-La-Preste par le Pla Guillem, certains élus du SIPARC décident d’agir de manière autonome. Sur leur initiative, une profonde tranchée de près d’un kilomètre de long est creusée en juin 1994 au milieu du Pla Guillem dans l’objectif de contenir la divagation des véhicules. Cet acte bouleverse les esprits : la communauté scientifique, l’ONF, une partie des élus du massif et de nombreux habitants dénoncent vivement ce qu’ils considèrent être une catastrophe paysagère et écologique. Le Préfet intervient en fermant définitivement cette piste et l’Etat accélère la mise en place du dispositif Grand Site en commanditant les premières études.

L’on peut dire aujourd’hui que, ce que d’aucuns nomment « l’affaire du Pla Guillem », est l’élément fondateur du projet de Grand Site de France du massif du Canigó.

2000-2012 Les Opérations Grand Site

En 2000, ça y’est ! Les périodes de lutte par les acteurs locaux depuis les années 1950 ont porté leurs fruits ! Le massif du Canigó entre officiellement dans la démarche Grand Site de France, exigeante mais garante de sa protection environnementale. L’implication des élus et différents acteurs du territoire amènera, en 2012, à la labellisation Grand Site de France par le Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

La première convention Opération Grand Site (OGS) est signée en présence de l’État, la Région, le Conseil Général, le SIPARC (regroupant alors 31 communes du massif) et l’Office national des forêts, le 11 juillet 2000 au refuge des Cortalets.

La signature de la première convention OGS au refuge des Cortalets / SMCGS

La première phase de l’OGS s’inscrit dans la continuité des actions engagées dès 1998, intégrant les préconisations des études préalables dans un programme de 51 fiches-actions. Cette opération tend vers un objectif fondamental, celui de favoriser la diffusion des flux touristiques sur l’ensemble du massif, de façon à préserver les espaces naturels les plus sensibles et à engendrer des retombées économiques en piémont et dans les vallées.

Dans ce cadre, diverses actions ont permis de restaurer les espaces les plus dégradés, notamment la revégétalisation du tracé de la piste du Pla Guillem suite à sa fermeture.

Conformément à la volonté affichée dans la convention, le Syndicat mixte Canigó Grand Site, structure de gestion unique fédérant tous les porteurs de l’OGS, est créé sous l’impulsion du Conseil Général en septembre 2002 dans l’élan de l’année internationale de la montagne proclamée par l’ONU. Après une étape d’installation, le Smcgs a mis en place, dès 2004, les premiers outils de gestion des flux dans la concertation, inaugurant ainsi une nouvelle gouvernance de l’action publique sur le massif.

Suite à un audit de la première phase d’OGS réalisé en 2005 sous la forme d’un bilan prospectif, montrant que le Canigó n’était pas encore prêt à demander la labellisation Grand Site de France, une seconde convention OGS est signée le 17 mars 2007 par l’État, la Région, le Conseil général, le Smcgs et l’ONF.

Le Smcgs se dote d’un plan d’actions pluriannuel couvrant la période 2007-2016. Par ailleurs, souhaitant s’impliquer directement dans l’application locale du programme Natura 2000, le Smcgs est officiellement désigné en 2007 opérateur de trois sites Natura 2000 (ZSC « Massif du Canigó »; ZSC « Conques-de-la-Preste » ; et ZPS « Canigó – Conques-de-la-Preste »), dont le périmètre couvre une superficie de 20 244 ha.

Le Syndicat s’affirme progressivement sur le territoire, impulsant une dynamique de concertation qui permet de finaliser un plan de circulation et de lancer des projets structurants à l’échelle de l’ensemble du massif, notamment les Tours & Ronde du Canigó, itinéraires de randonnée en boucle permettant la découverte du site et de ses richesses patrimoniales.

La navette hippomobile sur le site des Cortalets / SMCGS

Devenu un Grand Site préservé et géré, le Canigó fédère tous les acteurs du territoire dans une approche de développement fondée sur la mobilité douce et la valorisation des patrimoines. Le massif du Canigó est labellisé Grand Site de France par décision ministérielle du 13 juillet 2012. Il devient le 13ème Grand Site de France labellisé au niveau national.

« Ecouter le monde », œuvre en verre optique massif, créée en 2005 par Bernard Dejonghe / SMCGS

2013-2017 La première labellisation

Une procédure d’extension du site classé est lancée en 2007, suite au combat mené par les élus et les habitants du massif contre le passage d’une ligne électrique à très haute tension (THT). Elle aboutit en 20131 à la protection de 23 212 hectares, devenant ainsi le quatrième site classé de France par sa superficie.

1Décret ministériel du 23 août 2013

Les périmètres de protection du patrimoine naturel / SMCGS

Sont désormais inclus dans le site classé le Pla Guillem, l’ensemble des 3 réserves naturelles nationales de Py, Mantet et Prats-de-Mollo, les cinq refuges gardés du massif du Canigó (Cortalets, Batera, Sant Guillem, Les Conques, Marialles) et le site patrimonial minier de la Pinosa. Ce changement d’échelle implique une approche différente dans la manière d’aborder le massif.

Rappel du projet 2007 – 2016

La stratégie de gestion, préservation et valorisation du massif du Canigó, intégrée au dossier de candidature au label Grand Site de France déposé en 2012, s’articule autour de quatre objectifs :

  1. Maintenir l’attractivité du Canigó identifiant 3 orientations :
    • la diminution de la pénétration motorisée dans le massif,
    • l’affirmation d’une image renouvelée de destination haute montagne,
    • l’augmentation de l’effort de promotion,
  2. en protégeant et valorisant les principales ressources du massif par :
    • l’approfondissement des connaissances scientifiques des patrimoines,
    • le renforcement des compétences techniques dans le domaine environnemental,
    • l’amélioration de la qualité paysagère et de l’esprit des lieux,
  3. pour favoriser le développement local des communes en agissant en faveur de :
    • la diffusion des flux par l’identification de nouvelles formes d’interconnexion entre piémont et site classé,
    • la promotion des structures d’accueil et d’animation des communes,
    • l’incitation des professionnels à articuler leurs produits autour des Tours et ronde du Canigó,
  4. ce qui passe par la volonté d’ancrer définitivement le Grand Site dans le paysage local impliquant :
    • l’approfondissement de la mutualisation des compétences et outils techniques entre gestionnaires,
    • le renforcement de l’image des Grands Sites de France,
    • la certification de la gestion environnementale du Canigó à travers les démarches de qualité avec l’obtention du label GSF.

Cette stratégie se décline en cinq enjeux d’intervention, structurés en seize programmes et déclinés en 86 actions :

Le récapitulatif de la stratégie 2007-2016 / SMCGS

Bilan quantitatif du plan d’actions 2007 – 2016

L’évaluation du plan d’actions du Grand Site de France 2007 – 2016 a été réalisée par le Smcgs entre février et septembre 2016 avec l’appui du Comité de suivi du label Grand Site de France. Le bilan de sa mise en œuvre est résumé dans le graphique suivant :

Le bilan de la mise en œuvre du plan d’actions 2007-20016 / SMCGS

2018-2024 L’ambition du renouvellement

Les travaux et concertations, conduits entre 2015 et 2017, ont permis d’identifier quatre grands enjeux déclinés en treize objectifs :

Enjeu n°1 : Préservation et valorisation des patrimoines naturels et culturels du site classé

La richesse et la valeur patrimoniale du Grand Site de France et du site classé du massif du Canigó en particulier, invitent à porter une attention toute particulière à l’état de conservation des patrimoines naturels et culturels confrontés aux pressions et usages du site. Par une coordination renforcée des acteurs et outils de gestion et des usages, impliquant amélioration des connaissances, préservation et valorisation, il s’agit de garantir l’état de conservation patrimoniale du site classé sur le long terme. Pour y parvenir, trois objectifs sont fixés.

Objectif 1.1 : Améliorer la connaissance des patrimoines du site classé

Objectif 1.2 : Préserver l’état patrimonial du site classé

Objectif 1.3 : Valoriser les ressources patrimoniales

Le massif depuis le sommet du Canigó / Michel CASTILLO-CD66

Enjeu n°2 : Maintien de la qualité paysagère du Grand Site de France

Les paysages d’exception du Grand Site de France fondent en partie l’attractivité et la dimension emblématique du territoire. Si ceux-ci ont profondément évolués depuis le début du siècle dernier sous l’effet des activités humaines (pressions pastorale, minière, forestière, urbaine,…), leur préservation et leur valorisation sont essentielles car à l’origine des aménités du Grand Site de France. Ainsi, le récent plan de paysage adopté à l’unanimité lors de la séance du 7 juillet dernier, a permis de mettre les questions paysagères au cœur du débat territorial. Il s’agira de capitaliser sur cette dynamique et sur les fondements de ce document de référence pour répondre aux objectifs de qualité paysagère du territoire. Outre l’expertise paysagère mobilisée par le Smcgs, l’inspecteur du site et le paysagiste conseil de la DREAL seront associés autant que de besoin à la définition des projets, lesquels seront par ailleurs évoqués dans l’instance de coordination présenté précédemment (objectif 1.2).

Objectif 2.1 : Poursuivre la restauration des paysages dégradés du site classé

Objectif 2.2 : Participer activement à la préservation des paysages du site classé

Objectif 2.3 : Favoriser les projets de qualité, respectueux des paysages du Grand Site de France

Fillols, village au pied du massif du Canigó / Michel CASTILLO-CD66

Enjeu n°3 : Gestion de l’accueil et conciliation des usages

La gestion de l’accueil est pris en compte dans le « dispositif estival de gestion de l’accueil et des flux » mis en place chaque été par le Smcgs avec lequel s’articule le plan de circulation motorisé et la charte d’organisation des manifestations sportives et culturelles à l’échelle du site classé (23 212 ha). L’attractivité de la partie sommitale du massif est réelle et les flux inégalement répartis sur l’ensemble du site classé. Pour une gestion plus transversale et efficiente de l’accueil, les actions de gestion des flux doivent être mises en relation avec l’infrastructure existante (pistes, refuges, réseau d’itinéraires, sites APN,…) et articulées à une échelle territoriale beaucoup plus large (destination Canigó, littoral,…) à l’origine de l’essentiel des flux de la partie sommitale. Dans une perspective de gestion multifonctionnelle et durable du site classé du massif du Canigó, l’ensemble des usages traditionnels (pastoralisme, foresterie, pyrénéisme, randonnée, cueillette, chasse, …) et les pratiques actuelles (course en montagne, drone, recrudescence du bivouac,…) doivent également être pris en compte et leur impact évalué pour garantir l’état patrimonial du site classé. Dans une perspective de gestion partenariale en réseau, trois objectifs découlent de cet enjeu :

Objectif 3.1 : Maîtriser et déconcentrer la fréquentation sur le site classé

Objectif 3.2 : Concilier les usages traditionnels et actuels du site classé

Objectif 3.3 : Organiser le territoire de visite et qualifier l’offre de découverte du Grand Site de France

Sur le sentier du pic du Canigó / SMCGS

Enjeu n°4 : Participation au développement durable du territoire et à son rayonnement

Plus qu’un pic et un massif, le Grand Site de France du massif du Canigó est à cheval sur deux bassins de vie correspondant à ses deux versants nord et sud aux caractéristiques socio-économiques assez similaires. Bien que disposant de nombreuses ressources (naturelles, humaines, patrimoniales, …) et d’une situation géographique privilégiée (climat, accessibilité,…), ce territoire a du mal à convertir ses nombreux potentiels en termes de développement local. Sans perdre de vue sa vocation première de préservation du site classé, la démarche Grand Site de France doit davantage participer au développement local et durable du territoire. Dans cette perspective, quatre objectifs ont été identifié :

Objectif 4.1 : Contribuer à la dynamisation de l’économie du Grand Site de France

Objectif 4.2 : Développer la destination éco-touristique « Canigó Grand Site »

Objectif 4.3 : Impliquer la population à la mise en œuvre du projet de territoire

Objectif 4.4 : Participer au rayonnement du territoire

Visiteurs dans les gorges de la Fou à Arles-sur-Tech / Michel CASTILLO-CD66